En 1960, lors de sa campagne présidentielle, le président John Fitzgerald Kennedy avait prononcé un discours durant lequel il a lancé une phrase restée célèbre, et reprise par de multiples candidats politiques à travers le monde : « Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez vous ce que vous pouvez faire pour lui ! » Il invitait ainsi ses concitoyens à ne pas attendre l'aide de l'état, à se prendre en charge et à œuvrer au développement et à la grandeur de leur pays.
Je pense que cette phrase est profondément juste, et c'est la raison pour laquelle elle est restée dans les mémoires. Chaque citoyen, de quelque pays qu'il soit, devrait la prendre à son compte
s'il aime son pays. Mais j'ai envie d'aller plus loin et de la conseiller à titre individuel, à tous et particulièrement aux minorités. En ce qui les concerne, il faudrait qu'elles l'appliquent à
elles-mêmes avant de penser au pays dans lequel elles vivent.
Je pense ici plus particulièrement à la minorité musulmane vivant en France, à laquelle j'appartiens. A longueur d'année, chaque fois qu'on fait parler mes coreligionnaires vivant difficilement
dans des banlieues de plus en plus dures, on entend inlassablement la même complainte : « on n'est pas intégré, on souffre du chômage... » Certes, pendant longtemps, la France a
préféré cantonner ces populations venues d'ailleurs le plus loin possible de ses centres villes. Certes, il était et il est encore difficile de louer un appartement dans certains quartiers
lorsqu'on porte un nom arabe ou africain. Certes, il était et il est encore difficile de trouver un emploi, lorsqu'on porte ce genre de nom. Pire encore, plus cet emploi est intéressant et
valorisant, plus cela est difficile. Mais difficile ne veut pas dire impossible !
Afin que cela devienne possible, il faut arrêter de se lamenter et se prendre en main, en ne comptant que sur soi-même, et sur Dieu. Il faut accepter la réalité, se dire qu'on doit en faire
toujours plus que ses compatriotes autochtones (les « franco-français » comme se définissent de plus en plus certains Français, dont je ne citerai pas l'appartenance idéologique et
politique) pour arriver au même résultat, puis pour les dépasser quand c'est possible.
Il faut partir du principe que c'est d'abord à nous de faire l'effort nécessaire pour nous intégrer. Il faut se dire que l'intégration est une affaire personnelle avant d'être une affaire
gouvernementale. En adaptant la phrase de Kennedy : « que puis-je faire pour moi-même, pour me faire ma place dans cette société, pour me faire accepter et faire accepter ma
communauté ? » En théorie, cela est moins compliqué qu'il n'y paraît.
Pour s'intégrer, il n'est pas nécessaire de prendre un prénom à consonance non-arabe, ou à renier la langue de ses parents, ses origines ou sa religion. S'intégrer ne signifie pas s'effacer,
s'assimiler. Cela signifie se faire une place au sein de la société, se faire accepter et respecter, tout en restant soi-même. Mais pour être respecté, il faut commencer par se respecter soi-même
et respecter cette société et toutes ses règles.
Le respect de soi commence par le travail. N'est pas digne de respect celui qui préfère vivre de l'assistanat que du fruit de ses efforts. Une telle personne est également indigne de sa religion,
car l'Islam valorise l'effort et rejette la passivité. Un proverbe arabe dit : « Maudit soit celui qui tend la main ». Tendre la main signifie mendier, auprès des personnes ou de
l'état. Un autre proverbe : « la nourriture est meilleure lorsqu'elle est gagnée à la sueur de son front. » Je ne dis pas que lorsqu'on vient de perdre un emploi, il vaut mieux se
laisser mourir de faim que de percevoir les allocations de chômage. Mais on doit accepter cette aide au strict minimum et tout faire pour se remettre au travail, quitte à se recycler ou à partir
s'installer ailleurs.
Mais pour être respecté, il faut aussi commencer par respecter les autres et les institutions. Le respect des autres passe par le savoir vivre, à commencer par les relations de bon voisinage. Rappelons que ces relations sont sacrées en Islam. Le musulman se doit de respecter et de secourir son voisin, quel qu'il soit. Un hadith dit à ce propos : « N'est pas musulman celui qui peut dormir en sachant que son voisin a faim. »Pour en revenir aux banlieues difficiles, comment voulez-vous vous intégrer quand vous avez un comportement de barbare ? Attention, je n'ai pas dit que tous ces habitants étaient des barbares, mais certains. Outre l'assistanat de certains, la délinquance d'autres, il y a surtout le manque d'éducation. Comment accepter des gens qui passent leur temps à crier et à insulter à toute heure du jour et de la nuit, empêchant les honnêtes gens, musulmans et autres, de dormir la nuit pour pouvoir aller travailler le lendemain ? Comment accepter des gens, si minoritaires soient-ils, qui semblent ne pas savoir ce qu'est la propreté.
A ce propos, j'ai envie de vous raconter une histoire très édifiante et instructive à plus d'un titre. Le Prophète Mohammed, que la paix et la bénédiction soient sur lui, avait un voisin juif. Je
précise que beaucoup de Juifs vivaient dans la péninsule arabique en ce temps-là. Chaque jour ou presque, ce voisin déversait ses ordures devant la porte du Prophète, sûrement pour lui témoigner
son animosité mais surtout son aversion pour son Message. Ce qui est compréhensible, puisque chaque prophète a rencontré le rejet des adeptes de la religion précédente. Un jour, le Prophète fut
très surpris de ne pas trouver d'ordures devant sa porte. Il en fut de même les jours suivants, si bien qu'il finit par s'en inquiéter. Il décida de rendre visite à son voisin, pour prendre de
ses nouvelles. Il apprit ainsi que ce dernier était malade et alité. Le méchant voisin demanda au Prophète la raison d'une telle visite : comment pouvait-il venir voir celui qui déversait
toujours ses ordures devant sa porte ? Le Prophète lui répondit, qu'Allah, le Très-Haut, recommandait d'avoir de bonnes relations avec tous ses voisins. Le juif fut tellement surpris qu'il
se convertit à l'Islam, avant de mourir. Par son comportement, la preuve de son extrême sagesse et son humanité, le Prophète amena un étranger à vouloir s'intégrer à la communauté
musulmane !
Aujourd'hui, dans ces cités, les temps ont malheureusement bien changé. Ce ne sont pas les autres qui déversent des ordures devant la porte des musulmans. Ce sont certains parmi ces derniers,
minoritaires mais trop nombreux, qui déversent leurs ordures au bas des immeubles, et qui s'étonnent ensuite que leurs voisins non musulmans ne les supportent pas et préfèrent partir vivre le
plus loin possible ! Il en est de même pour leurs voisins bons musulmans, qui subissent le résultat de tels comportements : une plus forte discrimination. Ce qui rend plus difficile
leur départ vers d'autres quartiers plus calmes.
Pour être respecté et s'intégrer, il faut aussi respecter toutes les institutions. Ce n'est pas en enfreignant les lois, en brûlant et en cassant pour exprimer sa colère, aussi légitime
soit-elle, que l'on fera progresser l'intégration. Bien au contraire, cela ne fait qu'accroître le mépris, le rejet et la haine. Plus les banlieues brûlent, plus le front national monte et la
haine augmente.
La première institution qu'il faut respecter est l'école. C'est à elle que nous confions très tôt nos enfants, et c'est d'abord par elle que passe l'intégration. En effet, comment s'intégrer dans
une société dont on ne maîtrise ni la langue ni la culture ? Vous me direz que beaucoup de Français, plus ou moins de souche, ne maîtrisent ni l'une ni l'autre, sans qu'on remette en cause
leur appartenance à la nation. Mais il n'en est pas de même pour nous. Comme je vous le disais, nous devons toujours faire plus. Ce n'est pas en braillant dans une langue inventée, faite de
mélange d'arabe et de français bizarre, ce qui est une atteinte et une insulte pour ces deux langues, que vous serez intégré.
Il faut donc commencer par donner une bonne éducation à nos enfants (c'est le premier rôle de tout parent digne de ce nom), leur inculquer le goût du travail, leur donner l'envie d'apprendre,
puis les suivre et les encourager au maximum dans leur scolarité. Je vous rappelle que le savoir, quel qu'il soit, est fortement valorisé par notre religion. Un hadith dit : « Allez
chercher la science, même si pour cela vous devez aller jusqu'en Chine ». Je vous rappelle qu'à cette époque les Arabes voyageaient à dos de chameaux ou en bateau, alors imaginez
l'effort ! Plus ils auront de diplômes, plus ils s'intégreront facilement, et plus ils gagneront d'honneur pour leur communauté. L'autre avantage des diplômes, c'est que si la France refuse
encore de leur faire la place qu'ils méritent, ils ont le monde entier pour les accueillir et valoriser leurs compétences. Ainsi, beaucoup de nos diplômés ont dû s'expatrier, et s'installer entre
autres au Qatar, au Canada, aux États-Unis, au Royaume-Uni et autres pays qui ont su reconnaître leur vraie valeur. A la maison, c'est à nous de leur apprendre notre culture d'origine et notre
religion, pour qu'ils ne renient rient et bénéficient d'une véritable double culture.
En résumé, il faut arrêter de se plaindre et se remettre en question. Que faisons-nous, chacun, pour nous intégrer ? Sans oublier que le comportement des plus mauvais nous nuit à tous !
Si tous les musulmans de France se contentaient simplement de mettre en pratique tous les principes de leur religion (générosité, honnêteté, respect, justice, éducation, travail...), s'ils
avaient un bon comportement, leur intégration serait grandement facilitée. Comme je le disais précédemment (cf « le halal est-il un mode de vie ? »), s'ils vivaient selon les
fondements de leur religion, ils seraient plus qu'intégrés, ils seraient enviés et pris en exemple. Les pays occidentaux, qui se plaignent tant du vieillissement de leurs populations,
appelleraient de tous leurs vœux les musulmans de tous pays, au lieu d'en avoir une peur noire, pas bleue ! Il faut aussi dire que si tous les musulmans du monde appliquaient de tels
principe nos pays d'origine seraient de véritables paradis, que personne ne souhaiterait jamais quitter !
J'espère de tout mon cœur qu'un jour les musulmans de France gagneront leur intégration et tout le respect que notre religion mérite. Il suffit pour cela que nous nous en montrions dignes ,
en actes plus qu'en paroles. J'espère aussi de tout mon cœur que les pays musulmans finiront par trouver la bonne voie qui fera d'eux des pays où il fera bon vivre et retourner si mon premier vœu
n'est pas exaucé. Que Dieu soit avec nous tous dans ce digne combat, inch'Allah.
N. I.